2 mars 2017

Desierto

En lançant Desierto, j'avais peur de tomber sur un film engagé, au propos lourdingue, porteur d'un message se voulant fort sur l'immigration mexicaine aux Etats-Unis. La présence de Gael Garcia Bernal en tête d'affiche, habitué aux films sociaux, a participé à m'induire en erreur. En réalité, le sujet n'est que le prétexte d'un thriller tout ce qu'il y a de plus minimaliste puisqu'il s'agit, pendant près de 90 minutes, de voir des pauvres chicanos pris en chasse par un immense taré appliquant sa politique d'immigration personnelle, qui les flingue un à un et lance un chien fou à leurs trousses. Vers l'heure de film, Jonás Cuarón juge judicieux d'ébaucher un peu ses personnages et nous propose les premiers véritables dialogues entre les deux derniers survivants. Hélas, ça ne prend pas, c'est beaucoup trop tard et on s'en contrefout complètement. On préférait presque le clébard, aussi agressif soit-il, dont la mort, impressionnante et ridicule, survenant quelques minutes auparavant, lui rend fort peu hommage. A ma connaissance, c'est bien le seul film où l'on voit un chien crever ainsi, flingué par Gael Garcia Bernal, qui lui fourre la fusée d'un pistolet de détresse en pleine gueule ! Le chien, devenu pur CGI, s'illumine littéralement de l'intérieur, se met même à clignoter étrangement tout en couinant à la mort, et finit par prendre laborieusement feu. Son maître verse une larme en retrouvant les morceaux calcinés du toutou, qui émet encore quelques râles absurdes malgré qu'il soit tout à fait mort (léger couac de synchronisation entre l'image et le son à souligner lors de cette scène, pourtant la plus marquante du film, dommage...).




Ma compagne lisait à côté pendant que je matais ce truc. A un moment donné, elle a levé les yeux, froncé ses longs sourcils puis m'a demandé avec une intonation faussement neutre : "C'est quoi ce film ?". Je ne savais déjà pas trop quoi lui répondre. En quelques secondes, elle avait compris en quoi ça consistait. "Euh c'est Desierto, c'est des mexicains qui essaient de passer la frontière et y'a un mec qui se les fait, je m'attendais pas trop à ce que ça prenne cette tournure...". "Pourquoi tu regardes ça ?". Là encore, j'étais pris au dépourvu, je me sentais coincé dans l'angle de mon canapé, pris en étau entre ses deux sourcils. J'avais mes raisons, mais elles n'étaient pas bonnes, et je le savais. J'essayais quand même péniblement de me justifier. "Bah... Il était déjà 22h, je voulais un film pas trop exigeant, que je pouvais éventuellement arrêter avant la fin... [blanc] C'est le fils du gars qui a fait Gravity... [gros blanc] Et y'a un acteur qui joue parfois dans des films intéressants, celui avec la casquette-là, Gael Garcia Bernal... Tu le connais pas ? Il plaît aux filles, téma...". Elle n'a même pas regardé ledit acteur et s'est levée pour aller continuer à lire dans la chambre. J'avais perdu des points. Et le film se poursuivait lamentablement... 




Je n'ai donc pas compris ce film, que j'ai dû couper net au bout d'1h08 parce qu'il était en mkv et que mon lecteur ne permet pas de faire avance rapide sur les fichiers de ce format. Quand on voit avec quel malin plaisir Jonás Cuarón filme ces pauvres mexicains chercher des cachettes dans le désert, se faire tuer un à un par un as de la gâchette, on se demande bien ce qui l'anime, tout comme on se demande quel est l'intérêt de ces gerbes de sangs ajoutées numériquement aux pauvres cibles humaines qui tombent les unes après les autres. Bon, je ne doute pas que Jonás Cuarón fasse partie des "anti-Trump", comme son papa et comme pratiquement tout Hollywood, mais son film est tellement bête... 


Desierto de Jonás Cuarón avec Gael Garcia Bernal, Jeffrey Dean Morgan et Anne Hidalgo (2016)

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